AlainConnanQui êtes-vous Alain Connan ?

A votre première question : je répondrais en vous disant que si vous le saviez, cela m’arrangerait bien ! Montaigne a passé sa vie à tenter des réponses  à travers de magnifiques essais. Je ne suis pas certain qu’il y soit parvenu. Moi, il m aura fallu beaucoup de temps pour ne pas savoir grand-chose, n’avoir que très peu réussi à me connaitre, pas plus que de savoir celui que j’aurais  pu être en certaines circonstances. Ce dont je suis certain, c’est que j’aime et que je respecte la vie sous toutes ses formes. Que le prédateur suprême que je suis devenu  au bout de centaines de milliers d’années a une responsabilité terrible dans un environnement qu’il n’assume plus. Que depuis trente ans d’existence j’ai voulu défendre mes convictions avec pugnacité et humilité.

 

Comment avez vous connu Yves Marre ?

La "Flèche d'or" encore en activité commerciale.

La « Flèche d’or » encore en activité commerciale.

 

C’est Yves Marre qui m’a joint l’hiver 1992/1993. Il avait appris par le compagnon de sa meilleure amie, un de mes anciens seconds dans la Marine Marchande, que j’avais l’intention de passer la main aux jeunes de l’Association Greenpeace après un long périple en tant que Commandant des navires de Greenpeace International puis Président refondateur du bureau de cette Association en France. Ceci après un parcours complet dans la Marine Marchande.

Il me fit part de ses projets d’acquérir des bateaux encore en bon état mais destinés à la casse, par l’Europe. La première possibilité était de se faire donner une péniche ayant mis fin à son activité commerciale, de la rendre navigable par mer et de la convoyer jusqu’au Bengale pour en faire une unité médicale sur les fleuves mythiques de cet impressionnant delta. Ce projet dont je n avais pas immédiatement intégré l’extravagance, m’enthousiasmait. C’est ainsi que commença une aventure qui plus de vingt ans après n’est pas encore terminée.

Racontez-nous votre histoire de la naissance de Watever?

friendship

La Flèche d’Or transformé en FriendShip.

Je connaissais bien la Méditerranée pour l’avoir sillonnée en toutes saisons à la barre de puissants navires de commerce. Nous avions perdu beaucoup de temps en travaux et nous savions que l’appareillage vers l’Asie ne pourrait plus se faire avant les premiers mois de l’année 94. Je déconseillais très vivement à Yves un départ au cours de ces « mois des fous » comme les appellent  les marins du Midi. J’avais fixé une date ultime d’appareillage au 31 Décembre. Ma position n’était pas simple. Les autorités maritimes étaient au courant de cette histoire hors du commun. Le Directeur lui-même de la Sécurité aux Affaires Maritimes de Marseille, un autre de mes anciens Seconds, était venu me voir à Port St Louis pour m’informer de mes responsabilités vis-à-vis de la Marine et de notre Corporation face à une expédition qui en hiver, n’avait que peu de chance de réussir.

Qu’avez-vous fait alors ?

Yves Marre arrivé au Bangladesh avec FriendShip.

Après avoir eu une longue conversation avec Yves au cours de laquelle il me réitéra sa volonté d appareiller en hiver, je lui confirmais me retirer du projet. Je lui avais proposé d’attendre quelques mois pour me joindre au second chapitre de cette Saga.

La mort dans l’âme je quittais donc Yves, Jibi et la péniche le 31 Décembre 1993.Ce furent pour moi de longs mois de culpabilité. Ils furent à l’origine de monstrueuses erreurs commises dont la moindre ne fut pas de me marier avec une femme de trente ans ma cadette avec laquelle je n’avais rien en commun. C’est moi finalement qui vécus un naufrage puisqu’Yves accostait quelques mois après sain et sauf sur les rives des fleuves du Bengale.

Nous reparlâmes souvent ensemble de cet épisode et nous fûmes convaincus que si j’avais appareillé avec lui, nous aurions sans doute vécu le pire par des décisions mal comprises mal interprétées et mal vécues et que certainement  nous nous serions fâchés à jamais !

Peu de temps après son arrivée au Bengale, je rejoignais Yves et celle qui deviendra sa compagne, Runa Khan. J’allais vivre avec eux toutes les péripéties de l’aventure Bangali, détresse avec la quasi faillite due au manque de fonds, création de l’unité destinée au tourisme maritime avec l’achat de ce magnifique et imposant cargo à voile , un malar de Nagarbari qui deviendra le fameux « B613 », construction de modèles réduits pour la sauvegarde de la mémoire maritime de cet endroit du monde, enfin la joie de continuer Friendship avec la vétérante « Flèche d’ Or » grâce à  une donation spectaculaire et l’élaboration d’une flotte plus conséquente.Tout ceci et j en oublie certainement, jusqu’à aujourd’hui avec Watever,Taratari,MSRS,la donation du Rainbow Warrior et peut être bientôt des cargos à voile.

Comment Yves Marre et vous avez rencontré Marc Van Peteghem ?

C’est en 2004, grâce à mon vieil ami Eugène Riguidel, qu’Yves et moi pouvions rencontrer celui qui permit la continuation de cette épopée grâce à ses compétences, son charisme et  une amitié sans faille, Marc Van-Peteghem.

Photo Alain et Marc

Marc et Alain.

Une réunion des anciens de Greenpeace à Amsterdam m’amena à demander à cette Association de me faire don des navires ayant terminé leur vie active plutôt que de les envoyer vers une triste démolition. Je défendais un projet digne de Greenpeace au Bengale. J’obtins d’abord le m/v SIRIUS puis le s/s RAINBOW WARRIOR. Je me dirigeais immédiatement vers Marc, Yves et Jeremy Bertaud notre jeune collaborateur pour leur faire part de cette donation. Faute de fonds ,nous n allions pas pouvoir malheureusement mener à bien ce que nous souhaitions réaliser, mais le RAINBOW WARRIOR est désormais opérationnel au Bengale comme navire hôpital. J’avais été le chercher à Singapour pour le mener jusqu’au port de Chittagong.

 

Comment êtes-vous arrivé à Watever?10730818_702461189870772_8063277969056105995_n

Marc et Yves avait creusé les fondations de Watever, Gérald Similowski, créateur d’Aviation sans Frontières et moi-même en devenions les proches Amis et Conseillers. Jeremy fut le lien entre nous tous, et de nombreux jeunes nous rejoignirent aussi bien en France qu’ au Bengale.

La création et la mise en place de cette ONG ne se fit pas sans difficultés mais au fil des années naquit un esprit, une éthique commune à tous, suffisamment solide pour aborder de nouveaux projets. Et ils n’en manquent pas.

Le paragraphe qui débute ces propos sera aussi celui de la conclusion, avec tous de  l’ONG « WATEVER » dans la Générosité  la droiture et l’Amitié.