Racontes-nous ton parcours et comment tu t’es retrouvée chez Watever.
Après deux missions de solidarité au Népal et au Cameroun, mon diplôme d’ingénieure hydraulique en poche, j’ai souhaité continuer à m’investir dans l’aide au développement, à l’étranger pour le moment. Un poste technique ne m’intéressait pas forcément, je cherchais plutôt à faire de la gestion de projet, en tant que volontaire de solidarité internationale très précisément. C’est ainsi que je suis tombée sur l’offre d’emploi de Watever (via le site de recrutement de La Guilde) et découvert cette association qui m’a tout de suite plu car partageant mes valeurs et ma philosophie de la solidarité.
Quelle sera ta mission sur place ?
Afin de pérenniser l’action de Watever au Bangladesh et de tendre vers une autonomie complète de sa population pour la construction de bateaux sûrs et insubmersibles en composite, la mise en place d’un centre de formation s’est imposée d’elle-même (aucune formation n’existe actuellement dans le pays). Ma mission est de former deux professeurs bangladeshis à la construction navale composite et de monter le centre de formation dédié à cela. Une partie pratique se fera sur le chantier partenaire local TaraTari sur le mode de « l’alternance ». 11 formations seront réalisées lors des trois prochaines années et nous souhaitons, à terme, inclure ces cours au sein de l’éducation nationale. La demande en ouvriers qualifiés est grande !
Tu pars dans quelques jours au Bangladesh et l’équipe de Watever viendra te chercher à l’aéroport de Chittagong pour aller sur le chantier de TaraTari où se situe le centre de formation. Quels sont tes craintes et tes souhaits ? Que souhaites-tu retirer de cette mission ?
Mes craintes quant à cette mission et la vie différente qu’elle impliquera sont assez « pratiques ». Le confinement de l’expatriation, la barrière de la langue, les incompréhensions que peuvent entraîner les différences culturelles ou ma place en tant que femme dans un pays patriarcal et musulman. J’espère également être à la hauteur de la tâche qui m’attend, la barre a été mise bien haute par celle dont je reprends le poste. Concernant la technicité de la mission enfin, mes craintes ont été apaisées grâce aux formations dont j’ai pu bénéficier en France avant mon départ.
Sinon et de manière beaucoup plus générale, je souhaite via cette mission comprendre un peu mieux les enjeux de l’aide au développement. Sa portée. Ses vices et ses failles. Savoir si je continuerai dans la voie de la solidarité au sortir du Bangladesh. Quelles sont les réelles attentes d’une population « en développement » ? Jusqu’à quel point pouvons-nous/devons-nous/cela se justifie-t-il d’intervenir ? Et comment ?
S’immerger dans une autre culture nous permet de découvrir des visions différentes du monde et de son sens, d’autres façons de penser… et cela remet en question beaucoup de choses. On s’émerveille de nouvelles couleurs, saveurs, de nouveaux paysages. Mais aussi, et certainement surtout, je veux donner un sens à ce que je fais, travailler « utilement ».
Qu’emportes-tu dans ta valise ?
Outre le nécessaire « vital » (produit moustiques, tongues et chapeau) et une vingtaine de livres, j’ai pensé que l’important en arrivant au Bangladesh était de se faire accepter par l’équipe française sur place. Saucisson, fromage et pastis s’imposent donc !
Comment penses-tu que ton travail chez Watever peut contribuer au développement du Bangladesh ?
Watever est en partenariat avec le chantier naval bangladais TaraTari. Proposant à ses salariés des contrats de travail sur le long terme, cette entreprise s’applique à avoir une gouvernance éthique, chose malheureusement assez peu répandue dans le pays. Elle s’attelle également à conserver le patrimoine culturel de la plus grande flotte au monde ; cela me semble nécessaire car il ne faut pas oublier d’où l’on vient pour savoir où l’on va. De plus, le développement de la recherche sur le biocomposite témoigne de l’intérêt de Watever pour des solutions toujours plus propres. Le bateau en composite se retrouve ainsi au cœur d’un développement social, économique, environnemental et sécuritaire des populations du Bengale (la sécurité maritime sera bientôt renforcée grâce à la création d’une unité de sauvetage en mer). Tout ceci me paraît très complémentaire et sensé.
Pourquoi t’engages-tu dans un travail pour le développement des populations vulnérables ?
La construction de bateaux sûrs, durables et rentables est une demande et un besoin réel des habitants des pays en développement vivant au bord de l’eau et subissant ses caprices. C’est le point de départ de mon engagement à Watever. Plus globalement, la mondialisation et le développement des médias font que nous savons aujourd’hui, plus ou moins justement, ce qu’il se passe ailleurs ; nous choisissons alors chacun, ou pas, de le prendre en compte et d’agir. Je ne souhaite pas accepter comme chose acquise le confort et la facilité offerts par le hasard de ma naissance « au bon endroit ». Je crois possible une solidarité entre les peuples, et je la crois nécessaire à la lutte contre les injustices de ce monde. Mon engagement en est la conséquence logique et directe, tout simplement J.